Wes Montgomery (1923 – 1968) est un guitariste de jazz américain au style reconnaissable entre tous. Le son de ses Gibson à corps creux amplifiées est moelleux et précis, avec des attaques franches et un phrasé très swing.

Wes est un autodidacte de la guitare, qu’il a appris très jeune tout seul, créant non seulement son style mais une technique propre : il utilise exclusivement son pouce, ce qui mettrait dans une colère noire le premier prof de guitare venu. Malgré ce « défaut » qui n’en est en réalité pas un, son jeu est étonnamment rapide et il joue souvent en octave lors de ses solos.

Wes fut une véritable star de son vivant, et a pu jouer avec les plus grands, dont Lionel Hampton dont on a déjà parlé sur cette page. Le morceau dont nous allons parler ici date de 1960.
Il est intitulé « West Coast Blues », et c'est une composition de Wes Montgomery, qui est ici accompagné de Percy Heath à la basse, Albert « Toothie » Heath aux percussions, et Tommy Flanagan au piano dans son enregistrement original.

Comme son nom l’indique, c’est un blues, mais qui a plusieurs caractéristiques propres que nous allons détailler ici.

  • D’abord, il utilise le tempo et la rythmique de la valse, c’est-à-dire une mesure à 3 temps. C’est donc en quelques sortes une valse swinguée. Sur certaines partitions on trouve une mesure en 3/4, sur d’autres 6/4, les mesures étant groupées par 2.
  • Il est écrit en Bb, mais son mode est difficile à lire. A priori il est majeur, myxolydien. Mais il y a débat, certains accords étant substitués. En effet, on trouve dans la grille les Ab et Eb qui correspondent aux VIIème et IVème degrés de ce mode. Mais soudain, on passe en E, F, Dm, C#, F#... bref, c’est à s’y perdre. Et c’est peut-être ce qu’a voulu Wes : un thème facile à retenir, qui oscille entre les VII et IV, mais qui prend des tangentes théoriquement déconcertantes, mais finalement parfaitement enchaînées.
  • Enfin, c’est un blues dit « suédois », ce qui signifie que la grille de jeu du thème n’est pas la même que celle des solos.
Mais assez de théorie… passons à l’écoute! Concentrez-vous, et appréciez le swing impeccable des cymbales de ride, la basse bien appuyée et le son doux de la Gibson de Wes Montgomery sur ce titre qui est un des plus grands de sa carrière. Le solo de piano de Tommy Flanagan y est également superbe.